Europe 06/03/2024
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Union européenne

Débattre pour mieux se projeter

Dans un contexte toujours tendu malgré les annonces gouvernementales, les représentants des fruits et légumes destinés à la transformation rencontraient, lundi 26 février, les eurodéputées Anne Sander et Irène Tolleret, en marge du Sia.

Rencontre des représentants des fruits et légumes destinés à la transformation avec les eurodéputées Irène Tolleret et Anne Sander, en marge du Salon international de l'agriculture, dans les locaux de Chambres d'agriculture France.

© Crédit photo : ML

Irène Tolleret et Anne Sander, eurodéputées, étaient au Salon international de l'agriculture ; les représentants des fruits et légumes destinés à la transformation aussi... Avec tout ce petit monde à la capitale, il aurait été dommage de ne pas en profiter pour se rencontrer et échanger sur les enjeux à venir au niveau européen. Ainsi, André Bernard, président de l'interprofession de la tomate destinée à la transformation (Sonito), a-t-il pris l'initiative d'organiser un dîner de travail dans les locaux de Chambres d'agriculture France, le lundi 26 février.

Autour de la table, les représentants de l'Anifelt (fruits et légumes transformés), notamment de la Sonito (interprofession de la tomate transformée), du BIP (interprofession du pruneau d'Agen) de l'Unilet (interprofession française des légumes en conserve et surgelés), de l'Association nationale pommes poires (ANPP), de l'Afidem, l'interprofession des filières des fruits à destinations multiples transformés, ou encore de l'AOP noix du Sud-Ouest et l'Anibi (interprofession du bigarreau d'industrie). Tous étaient ainsi réunis pour débattre. Il faut dire qu'ils ont des particularités : "Nous représentons notamment des interprofessions courtes, puisqu'à part pour quelques-uns, nous n'allons pas jusqu'à la commercialisation et la distribution", précise Pascal Lenne, de l'Anibi.

Pour certaines des filières représentées, la mobilisation auprès de l'Europe a permis de conserver des aides couplées, comme la tomate, le pruneau, ou encore la cerise. "On se battra bec et ongles pour les garder, mais certains n'ont pas eu la chance d'en bénéficier, et la mécanique est assez difficile à mettre en place", souligne-t-il. Les discussions du soir, parmi d'autres, pourraient conduire à remettre le dossier sur la table donc. Car au cœur de la soirée, les sujets sont multiples : la contractualisation, la surtransposition, les produits phytosanitaires... Un tout pour marquer la volonté de mieux se faire entendre et amorcer la réflexion sur ce que sera l'agriculture européenne dans les années à venir.

Avoir les mêmes produits que les voisins sur l'étagère

Alors que la crise bat son plein, en France comme ailleurs, donner aux agriculteurs les moyens de produire et de vivre est primordial, l'agriculture apparaissant de nouveau comme un secteur économique et stratégique. La contractualisation des volumes produits permet une certaine performance, Éric Legras, ancien président de l'Unilet, le reconnaît : "Nos marchés sont européens et la contractualisation nous permet une efficacité économique par rapport à nos concurrents." Mais le problème s'accentue sur la transformation. "Nous avons perdu nos usines... Le malaise agricole est économique, mais pas que", ajoute-t-il. Car les difficultés à identifier la provenance des matières premières dans les produits transformés, malgré la demande des professionnels et consommateurs, sont réelles. Tous conservent cependant de l'espoir. "À condition que les députées ici présentes nous aident pour pousser vers une identification plus précise des origines", note Daniel Sauvaître, président de l'ANPP. "C'est un débat déjà mené par le passé, sans avoir toutefois de véritables évolutions. Aujourd'hui, le Parlement est suffisamment mûr pour porter le sujet, comme nous l'avons fait pour le miel ou les confitures. Le problème se situe plutôt au niveau du Conseil", reconnaît Anne Sander.

En France, la tendance de retour à un sourcing français pousserait certaines entreprises à se relocaliser sur le territoire, à l'image de Panzani (lire notre édition du 16 février dernier, p. 2). Mais pour les inciter à revenir, encore faut-il prouver que l'agriculture française peut répondre à la demande. "Il faudra être performants et compétitifs pour produire sauf que, par rapport à nos voisins, nous n'avons pas tout à fait les mêmes produits sur les étagères. Pour permettre aux agriculteurs de relever le défi, il faut leur permettre de produire", insiste le président de la Sonito.

Il fait évidemment référence aux produits phytopharmaceutiques. Cécile Le Doaré, directrice générale de l'Unilet, ajoute : "Nous avons besoin d'une mise en cohérence sur des points déjà entendus. Il ne s'agit parfois que de mettre en place les décisions, il n'y a même pas une ligne à changer dans la réglementation. Nous sommes les premiers artisans de la surtransposition que nous nous sommes imposés. Maintenant, il faut trouver les moyens de retirer la surcouche normative." Irène Tolleret confirme. L'harmonisation des intrants est nécessaire à l'échelle de l'Union européenne. "Nous sommes incroyablement lents, mais en plus on rajoute de la surtransposition française", reconnaît-elle, affirmant de plus que "l'essentiel est dans la capacité des organismes de recherche à pouvoir travailler ensemble, dans un système d'homologation modifiée".

Pour elle, il s'agit également de savoir comment se définit la souveraineté alimentaire. "Nous avons besoin des phytosanitaires et fertilisants, qui correspondent à nos besoins et ambitions de productions".

L'intégration d'un "mastodonte comme l'Ukraine"

Alors que les prochaines élections européennes se rapprochent et que la structure du Parlement pourrait se droitiser, Anne Sander n'attend pas de grands bouleversements pour la prochaine Pac. "Nous sommes en revanche, en Europe comme en France, dans un temps agricole important. Il faut cependant garder en mémoire que les gens qui travaillent dans les administrations ne vont pas bouger", note l'eurodéputé. Se mobiliser encore et encore pour peser restera donc nécessaire.

"Quand nous avons commencé à discuter la Pac actuelle, le contexte n'était pas le même et il y a donc des sujets qui n'ont pas été pris en compte", admet Irène Tolleret. Pour l'eurodéputée Renew, il faudra à l'avenir sécuriser les filières : "On s'est rendu compte qu'on était dépendant de nos voisins, pour l'engrais par exemple. Nous avons un bébé filière en cours de développement qu'il va falloir cocooner, sans basculer dans le protectionnisme pour autant." Une question d'articulations plus optimisée donc, d'autant que la guerre en Ukraine fait peser de tout son poids une incertitude globale.

"Au-delà de la routine habituelle de discussions autour de la Pac, nous avons probablement des plaques tectoniques en train de bouger au niveau européen", décrypte Gilles Teisseyre, fondateur du cabinet de lobbying 'Arcturus group', qui accompagne les filières présentes dans la stratégie à adopter auprès de Bruxelles. "Il va falloir se projeter sur une succession de Pac, pour savoir comment intégrer un mastodonte comme l'Ukraine. Je pense qu'il vaut mieux l'avoir avec nous plutôt qu'elle finisse avec Poutine, qui pourra faire exploser nos filières les unes après les autres s'il le décide", ajoute Irène Tolleret.

Une telle intégration viendrait rebattre les cartes, notamment sur la redistribution de la Pac, mais les deux eurodéputées sont confiantes : travailler ensemble intelligemment reste possible, d'autant que des alliances seront indispensables, le PPE (centre et centre droit) et les socialistes ne disposant ni l'un ni l'autre d'une majorité, d'après des sondages relativement stables ces derniers mois. "Vu le contexte, il y a une sensibilité à la question agricole qui n'est pas franco-française", rassure Anne Sander.

Pour le moment, les attentes restent donc grandes après les engagements et promesses "d'un commissaire à l'agriculture qu'on n'a pas entendu pendant cinq ans", note cette dernière. 

Manon Lallemand •

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